Construire des tables, pas des murs
Claudio Oliver
Curitiba, Brésil
On nous dit que nous vivons dans un monde où les ressources sont limitées alors que les besoins et les envies sont illimités. La réponse du monde à ce problème est l'exclusion, les murs et la violence. Cependant, si nous sommes chrétiens, nous sommes appelés à croire que Dieu a créé un monde rempli de richesses auqel il a fixé des limites, mais qui peut assurer une vie abondante pour tous. En tant que communauté, nous prenons acte de cette abondance de la création non pas en construisant des murs plus hauts, mais des tables plus longues pour manger et parler ensemble.
Tous les samedis, nous avons deux occasions, le déjeuner et le dîner, pour offrir à nos amis une grande table, des pâtes biologiques fantastiques et des produits de notre production agricole urbaine. C'est là notre réponse aux deux dernières années de division que notre pays a subies. Une grande nappe couverte de mets délicieux et sains, pour célébrer la plus ancienne des traditions chrétiennes : le partage de la table et de la parole.
Enseignants, voisins et ouvriers, jeunes et moins jeunes s'assoient ensemble à notre longue table. Nous apprenons les uns des autres et nous savourons la nourriture, les histoires et la vie, tout en entretenant la gaieté accueillante que Thomas d'Aquin appelait joie de vivre (eutrapelia).
Une simple assiette de gnocchis peut susciter des larmes de gratitude lorsqu'elle est servie avec sincérité ; un verre d'eau et un sourire peuvent apporter de l'espoir à un visiteur déprimé ; des amitiés nouvelles se créent autour d'un morceau de gâteau aux carottes brésilien. Plus encore, des personnes dont la vie est brisée peuvent faire l'expérience de la guérison lorsque celle-ci s'incarne, authentiquement et concrètement, dans des vies abondantes et des tables accueillantes.
Claudio et Katia Oliver vivent et servent comme pasteurs dans une communauté de vie à Curitiba au Brésil ; la Casa da Videira marche à la suite de Jésus depuis vingt-cinq ans.
Traduit de l'anglais par Marie-Noëlle von der Recke.
Hôtes chez nous
Clemens Weber
Berlin,Allemagne
La salle et prête et les tables dressées. Y ont été disposés pain de viande, purée de pommes de terre et choucroute. C'est la « soirée des invités » dans notre petite maison communautaire à Berlin. Elle compte six adultes, quatre enfants et un invité « à durée indéterminée ». Nous ne sommes qu’une petite bande. Mais l'église du Christ ne saurait exister seulement pour elle-même. Alors nous ouvrons nos portes.
Pendant la « soirée des invites » règne une grande effervescence : qui Dieu enverra-t-il aujourd'hui ? Nous ne savons jamais combien de convives attendre. Parfois c'est deux, parfois quinze. Mais on n'est jamais à court de nourriture.
Pendant qu'on mange, on parle. Souvent, on lit un texte court. Le dîner est suivi d'un chant, parfois d'un jeu, toujours d'une brève prière. Nous prenons Jésus au mot : « Partout où deux ou trois sont rassemblés en mon nom, voici, je suis au milieu d'eux. » C'est aussi simple que cela : nous ne pouvons rien faire de plus que préparer la nourriture et ensuite ouvrir les portes, dans l'attente que Dieu nous parlera à travers chaque invité présent.
Tom, SDF, se joint à nous régulièrement. « C'est un endroit merveilleux », nous a-t-il affirmé. Hans, qui a grandi sans ses parents, nous confie qu'il est reconnaissant d'avoir trouvé une famille. Ricardo, drogué en voie de guérison, nous a fait un dessin. La moitié supérieure est dorée, la moitié inférieure ténébreuse. Jésus – un chemin d'argent – relie les deux moitiés.
Cette expression de nos soirées ensemble nous convient parfaitement : tout est porté par l'Esprit. Nous vous en sommes reconnaissants. Et notre reconnaissance nous donne de nous sentir comme invités dans notre propre maison.
Depuis dix ans, Clemens Weber vit avec sa femme et leurs enfants dans une communauté chrétienne locale, installée à Prenzlauer Berg, Berlin.
Traduit de l'allemand par Dominique Macabie.
La préparation de la Sadza
Elizabeth Mambo
Negovano, Zimbabwe
Mon village s'appelle Negovano. Lors de cette célébration, nous savourons une réunion de la famille et des amis longtemps attendus. Certains sont venus d'Amérique, d'autres ont vécu ici toute leur vie. Quand nous faisons la fête, tout le monde est le bienvenu. On peut toujours faire circuler la nourriture. Nous commençons et terminons nos réunions par la prière et le chant – beaucoup de chants. Et on ne chante pas sans danser !
Lors de chacune de ces réunions, nous commençons toujours par cuire la sadza, l'aliment de base au Zimbabwe, en utilisant de la semoule de maïs moulue. La sadza cuite lentement sur un feu ouvert ; c'est tout un art pour obtenir la bonne consistance. La sadza rassasie bien et accompagne bien les autres plats : le riz à la sauce au beurre d'arachide, la courge musquée, le chou vert et la salade de tomates ainsi que le poulet ou la viande de chèvre cuits en un ragoût légèrement épicé. Nous cultivons tout nous-mêmes.
Les temps sont encore très durs dans les zones rurales du Zimbabwe ; nous nous inquiétons de l'avenir de notre pays.
Il y a eu plusieurs années de sécheresse et la situation gouvernementale ne s'est pas améliorée, même si le pouvoir a changé de mains. Mais nous ne sommes pas du genre à perdre l'espoir. Dieu est toujours avec nous, et nous sommes ensemble.
Elizabeth Mambo est kinésithérapeute et maman de 3 enfants. Elle vit actuellement à New-York mais reste en contact avec sa famille au Zimbabwe, à laquelle elle rend visite aussi souvent que possible.
Traduit de l'anglais par Marie-Noëlle von der Recke.