Comme ils n’ont pas trouvé place à l’hôtellerie,
Marie et saint Joseph s’abritent pour la nuit
Dans une pauvre étable où l’hôte les conduit,
Et là Jésus est né de la Vierge Marie.
Il est à peine né qu’aux pâtres d’alentour,
Qui gardent leurs troupeaux dans la nuit solitaire,
Des anges lumineux annoncent le mystère.
Beaucoup sont en chemin avant le point du jour.
Ils portent à l’enfant, couché sur de la paille
Entre l’âne et le bœuf qui soufflent doucement,
Des agneaux, du lait pur, du miel et du froment,
Tous les humbles trésors du pauvre qui travaille.
Le dernier venu dit : « Trop pauvre, je n’ai rien
Que la flûte en roseau pendue à ma ceinture,
Dont je sonne la nuit quand le troupeau pâture.
J’en peux offrir un air, si Jésus le veut bien. »
Marie a dit que oui, souriant sous son voile...
Mais soudain sont entrés les mages d’Orient ;
Ils viennent à Jésus l’adorer en priant,
Et ces rois sont venus guidés par une étoile.
L’or brode, étincelant, leur manteau rouge et bleu,
Bleu, rouge, étincelant comme un ciel à l’aurore.
Chacun d’eux, prosterné devant Jésus, l’adore :
Ils offrent l’or, l’encens, la myrrhe, à l’Enfant-Dieu.
Ébloui, comme tous, par leur train magnifique,
Le pauvre chevrier se tenait dans un coin ;
Mais la douce Marie : « Êtes-vous pas trop loin
Pour voir l’Enfant, brave homme, en sonnant la musique ? »
Il s’avance troublé, tire son chalumeau
Et, timide d’abord, l’approche de ses lèvres,
Puis, comme s’il était tout seul avec ses chèvres,
Il souffle hardiment dans la flûte en roseau.
Sans rien voir que l’Enfant de toute l’assemblée,
Les yeux brillants de joie, il sonne avec vigueur ;
Il y met tout son souffle, il y met tout son cœur,
Comme s’il était seul sous la nuit étoilée.
Or, tout le monde écoute avec ravissement ;
Les rois sont attentifs à la flûte rustique,
Et quand le chevrier a fini la musique,
Jésus, qui tend les bras, sourit divinement.
Les chansons de l’enfant, 1875.